Livres Uniks 4

Espace Topographie de l’art

 

Barbara Beisinghoff, Bruno Bressolin, Françoise Bridel, Horst Haack, Johann M. Kleber, Alexandre Leger, Gianpaolo Pagni, Jean-Loup Philippe, Turi Werkner

Commissaire : Horst Haack

Catalogue d’exposition

17 x 21 cm
64 pages en couleurs
Couverture souple à rabats
15 €

Catalogue disponible à la galerie

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Tous disent la même chose, mais jamais de la même façon. Pourtant, les dadaïstes et les maîtres certifiés de Fluxus, les penseurs de travers et les penseurs de rien du tout prétendent que la tête est ronde et qu’ainsi elle peut changer de direction et donc aussi de perspective. Car ce sont bien les perspectives qui déterminent notre image du monde – demande à la grenouille, à l’oiseau, demande au cavalier quel regard ils portent sur la nature, tu ne seras pas surpris. Plutôt ne pas être né que végéter dans un univers sans livres. Il n’y a peut-être pas grand monde qui soit de cet avis, mais assurément tout comptable, tout écrivain et critique, tout lecteur cultivé peut l’être. Pareilles choses, j’ai même entendu des lettres et des erreurs typographiques les chuchoter. Les livres de peintres, dans lesquels se trouve réunie sous les deux pages de couverture une suite de thèmes voisins ou une succession temporelle de créations, se célèbrent eux-mêmes. C’est parfaitement logique car chaque feuillet compte moins que l’ensemble. Les livres d’artistes en sont des parents proches, ils font partie des enfants adultères de cette forme artistique, bâtards, clebs, donc enfants de l’amour. « Hey you! Yes you, come closer, I show you something. I show you man’s fear in a handful of teeth. Look, I show you man’s joy in two hands full of ass. » Non, non, non, rien ne dérape ici, tout ça on peut le peindre ! Et au loin un chien aboie. Pourquoi peindre si c’est déjà écrit ? Le langage populaire le dit : « Un mot en dit plus que mille images. » « Breathe. »

C’est juste, mais il prétend aussi : « Une image en dit plus que mille mots. » Tout aussi juste. Les talents doubles peuvent tirer profit de ces deux dons, d’où les livres d’artistes. Ils ne confirment, ni n’amplifient, ni ne doublent pas toujours le message, il y a même des couples qui se contredisent, se relativisent ou s’affaiblissent, comme dans la vraie vie. « Non, William Blake n’est pas dans le lot des artistes de livres d’artistes. » Mais pourquoi pas ? Je voudrais bien le savoir. L’expert archi-diplômé m’apprend que « c’est parce que le vocable n’existait point encore de son ton temps ». OK, j’apprends. Les revenants toujours recommencés de dada et du surréalisme ont rangé le Grand Homme dans le mauvais tiroir. Dans un monde en ordre, les livres d’artistes peuplent les tiroirs de ces seuls artistes, et de personne d’autre depuis 1929. Cherchant une objection, je cite une lapalissade, qui stipule que les livres d’artistes sont faits par des artistes qui n’ont rien à dire et qui s’adressent à des amateurs d’art qui savent déjà tout. Silence.

Tous ces originaux sont-ils bien conscients que leur travail quotidien, tout leur savoir-faire, leur effort quasi obsessionnel, leur talent et leur métier sont exclusivement au service de l’accomplissement d’une mission autoattribuée qui résiste au vieillissement tout au long d’une vie ? Mais oui ! Et il n’y a là rien de tragique ni de regrettable, car inventer des livres procure une joie et une satisfaction immenses. Aussi cette forme artistique, qui prospère sans tambour ni trompette, à l’écart, est loin de s’éteindre et ne cesse de repousser.

Horst Haack

Exposition du 10 septembre au 6 novembre 2021, à l’espace Topographie de l’art (Paris). www.topographiedelart.fr

 

 

 

 

 

 

 

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